Dans l’édition hiver 2023 de la revue L’Hémicycle (« Refaire Nation»), je signe un papier intitulé « Raconter la France, mode d’emploi ». Partons du constat de la panne du roman national, et de la volonté d’un nombre croissants d’acteurs marchands de s’emparer du récit sur la France, je me suis posé la question : comment le politique peut-il y remédier?
Dans un moment où la perception d’un déficit de conteurs nationaux est aussi massif, j’ai défendu l’idée qu’il était temps de faire émerger de nouvelles voix françaises. Dans ce cadre, le politique a vocation à jouer un rôle central; mais au lieu de chercher à tenir le premier rôle – celui de conteur national -, il lui revient d’encourager l’émergence de ces nouvelles voix.

On se prend à rêver d’une version contemporaine du Federal Writers’ Project, du nom de ce programme fédéral lancé en juin 1935 par le gouvernement de Franklin D. Roosevelt. À l’époque, plus de 6 000 artistes et intellectuels ont été financés par le gouvernement américain pour réaliser la mission d’établir un autoportrait de la nation américaine, valorisant et de haute qualité.

Dans un moment où la société s’interroge à comment «refaire nation», quel plus beau projet y aurait-il de lancer un vaste programme national intitulé « Raconter la France », et qui aurait pour objectif de réaliser l’autoportrait du pays? Écrivains, photographes, cinéastes, mais aussi humoristes, rappeurs, auteurs de bande dessinée, influenceurs TikTok , etc. L’objectif serait de dépasser le seul «roman national des marques» pour mettre à contribution tous les talents créatifs de la nation, individuels comme collectifs, dans le but d’éclairer les mille et une facettes de notre pays. Et, par-là, faire la démonstration que oui, nous avons encore des choses à faire ensemble.