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L’Opinion – La bataille culturelle pour les classes dirigeantes 

J’ai découvert dans les textes de Léon Blum des réflexions d’une furieuse actualité. Dans « À l’échelle humaine », texte écrit en pleine Occupation, l’ancien leader du Front populaire cherche à identifier les causes profondes d’une telle débâcle nationale. Elle est, selon lui, à chercher dans l’effondrement intellectuel et moral d’une partie importante de la société française, celle qui régissait alors le pays depuis un siècle et demi: la bourgeoisie, prise en tant que classe dirigeante. «Si nous ressentons aujourd’hui l’impression dans laquelle se résument toutes les autres, celle d’un affaissement général de la société française, écrit-il, la raison profonde est bien que cette société avait une armature bourgeoise, et que l’armature a cédé». Pour expliquer Vichy, et les pleins pouvoirs votés par l’Assemblée nationale à Pétain, Blum théorise l’idée que, dans son effondrement moral, la bourgeoisie a créé une «vacance de pouvoir», un vide que le fascisme s’est empressé de remplir.
Je pense que c’est très exactement ce à quoi nous assistons. Mais alors, que faire pour éviter l’effondrement moral de nos classes dirigeantes? Là encore, Léon Blum est d’une précieuse aide. Dans « Le théâtre de Léon Blum »,

Milo Lévy-Bruhl, doctorant en philosophie politique, a sélectionné et présenté trente critiques théâtrales de Léon Blum, écrites au tout début du XXe siècle. Ce que Lévy-Bruhl montre avec brio, c’est que Blum utilise la critique théâtrale comme un prolongement de son engagement socialiste, en devenant le premier «critique socialiste du théâtre bourgeois». L’idée est la suivante: investir le lieu de la bourgeoisie pour l’influencer, et la ramener dans le camp du socialisme démocratique. Constatant avec effroi, lors de l’Affaire Dreyfus, qu’une partie importante de la bourgeoisie marquait une dangereuse tendance réactionnaire, Blum s’est donné pour objectif de montrer, au sein de ses propres productions culturelles, tout ce qui signalait un besoin de socialisme.
Voilà peut-être un chemin pour les années qui nous séparent de la prochaine élection présidentielle: mener une bataille culturelle pour les classes dirigeantes.

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